Les enjeux de la lutte contre les TMS
pour les entreprises

mai 27, 2021

TMS (1) : apparu dans les années 1990, il s’agit très certainement d’un des acronymes les plus connus et utilisés dans les milieux professionnels des secteurs de l’industrie, du bâtiment et des travaux publics, de l’artisanat, ou encore des services. Et pour cause ! Ces affections des tissus mous comme les muscles, les tendons ou les nerfs représentent plus de 85% des Maladies Professionnelles (MP) reconnues chaque année en France[1]. Derrière ce phénomène largement connu et documenté, se cachent de nombreuses idées reçues qu’il convient de contourner pour agir efficacement. L’ambition de cet article généraliste consiste à aborder les principaux enjeux et écueils des nécessaires démarches de lutte contre les TMS en entreprise.

 

Les Maladies Professionnelles : la partie visible de l’iceberg TMS

Ne pas se tromper d’indicateur(s). C’est selon nous le premier écueil courant des stratégies de lutte contre les TMS. Si l’intérêt d’évaluer et suivre objectivement l’évolution d’une situation ne fait aucun doute, un mauvais choix d’indicateur peut s’avérer contre-productif. En ce qui concerne les TMS, nous ne pouvons que déplorer que dans l’immense majorité des cas la problématique soit évaluée à travers des indicateurs « administratifs » comme les occurrences de MP qui sous-estiment et distordent largement l’ampleur de la problématique. A titre d’exemple, environ 40 000 MP de type TMS sont reconnues chaque année en France2, dont aucune problématique de la région cervicale (le tableau de reconnaissance de ces affections n’existant pas). Si on se réfère à des données de « terrain », on obtient des résultats nettement différents. Par exemple, sur la base du « questionnaire TMS de l’INRS[1] » complété par 426 salarié(e)s d’entreprises du secteur du conditionnement, il ressort que plus de 65% des répondants se plaignent de douleurs quotidiennes dans la région des cervicales. On constate aisément que, comme il existe un écart entre le travail prescrit et le travail réel, il existe un risque de s’orienter vers des priorités et actions inadaptées en fonction du prisme d’analyse initial pour lequel on opte. Pour notre part, nous pensons que les indicateurs de terrain, sources d’informations primordiales et facilement accessibles, doivent servir de base à la construction d’une stratégie efficace de lutte contre les TMS.

La lutte contre les TMS, pourquoi ?

En cohérence avec les arguments précédemment développés, nous défendons l’idée que la lutte contre les TMS intégrée à la stratégie de pilotage de l’entreprise représente beaucoup plus que la maitrise des MP associées à cette problématique. Nous pensons en effet que l’objectif d’une politique de lutte contre les TMS doit d’avantage être l’amélioration de la QVT[4], et même de la QVG[5], qui de surcroit conditionne l’adhésion nécessaire des acteurs impliqués aux différents niveaux de l’organisation collective. Comme on peut l’imaginer, en cas de réussite, une telle démarche influence positivement la performance globale de l’entreprise à travers l’optimisation de l’efficacité individuelle et collective (diminution de l’absentéisme, développement de la polyvalence). Au-delà, elle favorise également l’amélioration des relations et de la cohésion sociales, ce qui permet d’ailleurs de faire un lien vertueux avec l’autre problématique majeure de la QVT que représente la prévention des RPS[6]. On l’entend d’ici : « ok, tout ça c’est très bien, mais comment s’y prendre » ?

La lutte contre les TMS, comment ?

Les niveaux de prévention

Si la prévention primaire (action avant l’apparition du problème alors anticipé) représente un idéal théorique, la confrontation pratique à la réalité du terrain nous enseigne rapidement que la mise en place d’une action de prévention secondaire efficace (maitrise d’un problème lors de sa détection) représente un objectif plus réaliste. Nous proposons pour notre part une optimisation de cette démarche en généralisant les actions concrètes issues de mesures de prévention secondaires afin de mettre en place des actions de prévention primaire éclairées par le retour d’expériences fructueuses : un cercle vertueux à la fois ambitieux et réaliste !

La place de la motricité humaine

« Les TMS ont une origine multifactorielle » est certainement la phrase la plus récurrente lorsque ce sujet est évoqué. Si le caractère multifactoriel dans le développement des TMS est indéniable, nous pensons qu’il convient de ne pas lister les facteurs, mais bien de prendre en compte leurs interactions sans confondre les causes (qui peuvent représenter des leviers d’actions concrètes) et les conséquences. Nous proposons donc de remplacer la notion trop restrictive de « facteurs biomécaniques » souvent associée aux mouvements à la notion plus fine de « motricité humaine » faisant intervenir les facteurs neuromusculaires responsables de l’installation des TMS, parfois même en l’absence de mouvement. Ainsi, comme indiqué sur l’illustration du modèle proposé en figure 1, il n’y a pas de risque TMS (objet de prévention) sans influencer sur le système neuromusculaire (objet d’analyse), et ce dernier peut être sursollicité sur la base de facteurs de risques divers (à transformer en leviers d’actions de prévention). Par exemple, une organisation du travail à repenser qui augmente artificiellement les manipulations de charges ou la cadence, des situations stressantes qui sollicitent de manière invisible mais réelle les trapèzes supérieurs, des équipements inadaptés qui nécessitent des efforts évitables, etc…

TMS

Figure 1 : Proposition de modélisation des dynamiques (i) d’installation des TMS (en rouge à gauche) et (ii) d’une stratégie structurée de prévention dissociant l’objet de la prévention, l’objet d’analyse, et les leviers d’actions potentiels (en vert à droite).

Tout l’enjeu de la prévention consiste donc à analyser les paramètres pertinents du système neuromusculaire (en faisant appel aux sciences de la motricité) pour évaluer objectivement l’exposition au risque TMS et identifier les leviers de prévention mobilisables par des actions concrètes et réalistes. Tout cela sans se tromper de paramètres d’intérêt et sans se perdre en chemin… Ce qui nécessite d’être méthodique et d’utiliser des outils accessibles et adaptés que nous aurons le plaisir de vous présenter très prochainement !

Un article écrit par Whergo en association avec la Fondation Université Savoie Mont Blanc et le laboratoire LIBM

[1] Troubles Musculo-Squelettiques

[2] www.santepubliquefrance.fr

[3] Méthode de prévention des troubles musculosquelettiques du membre supérieur et outils simples. Dossier medico-technique TC 78. Doc Med Trav. 2000 ; 83 : 187-223

[4] Qualité de Vie au Travail

[5] Qualité de Vie Globale

[6] Risques Psycho Sociaux

 

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